Céline
Luchet
Rédactrice,
auteur
et un peu critique
Fidèle à sa démarche, l’architecte Antoine Lefebvre signe la transformation d’un grand appartement qui ressemble à son propriétaire, amateur d’art et de design. C’est un lieu de vie où les objets usuels et les œuvres sont mis en valeur par l’élégance intemporelle de l’architecture intérieure, à la fois minimaliste, épurée, chaleureuse et confortable.
Choisi pour sa luminosité, l’appartement occupe le premier étage d’un ancien hôtel particulier divisé en plateaux. A cette belle surface s’ajoutent deux niveaux prélevés dans le volume du bâtiment voisin, une ancienne écurie. Ils se raccrochent à l’appartement par un escalier discret, ouverture inattendue dans une visite déjà surprenante.
Aménagé avec cinq chambres pour une famille nombreuse, l’appartement avait perdu son aspect traversant et ouvert. La première intervention a été la mise à nu des volumes originaux, permettant à l’appartement de retrouver des proportions harmonieuses, ses planchers d’origine et un grand salon double orienté est-ouest. La distribution a été entièrement revue par un changement de destination de chacune des pièces, à l’exception du salon, auquel s’est greffée une salle à manger avec cuisine ouverte.
La lumière était une attente importante du client, qui passe de longues journées sans voir le jour dans le cadre de son travail. Orientées plein est, les fenêtres de la cuisine sont équipées de volets intérieurs d’inspiration flamande, qui permettent de moduler la luminosité et la chaleur en période de canicule.
Sur le mur mitoyen, les fonctions sont reprises en symétrie : côté salon, une cheminée de marbre noir encadrée d’armoires encastrées ; côté séjour-cuisine : des rangements semi-encastrés de part et d’autre d’un poêle JØTUL. Le vaisselier en bois plaqué d’une feuille de laiton poli camoufle sa fonction derrière une apparence proche d’un tableau monochrome, en écho aux œuvres accrochées aux murs. L’îlot cuisson et plan de travail rappelle un chariot d’hôpital : une structure légère, laissant passer les vues et la lumière, sur laquelle repose un plateau de marbre blanc.
Au-delà des murs blancs et du plancher d’origine, la cohérence d’ensemble est renforcée par des détails qui se répètent dans toute l’habitation. Les tubes d’acier soudés blancs, déclinés dans de multiples fonctions, agissent comme un fil conducteur : structure porteuse du plan de travail de la cuisine et des consoles de lavabos, pieds de tablettes murales, sèche-serviettes, rampe d’escaliers ou encore luminaires.
Grâce à ses dalles brutes identiques à celles de la terrasse, la salle de bain baignée de lumière zénithale est perçue comme un extérieur. L’effet est accentué par la grande baie donnant sur la terrasse, les plantes luxuriantes et l’emmarchement qui donne accès à la douche et au dressing / salle de yoga : un seuil est franchi, d’un extérieur brut vers un intérieur réchauffé par le bois et un éclairage plus doux.
Situé au rez-de-chaussée de l’ancienne écurie voisine, le studio est un ailleurs dans l’appartement, doté d’une personnalité propre. Adapté à des séjours de courte durée, le studio possède une entrée indépendante et une grande baie fixe donnant sous le porche de l’immeuble, un éclairage en second jour qui lui confère une atmosphère plus feutrée. Une cloison coulissante permet de découvrir alternativement le coin cuisine ou la salle de bain, cube entièrement carrelé de blanc, inspirée du travail du plasticien Jean-Pierre Raynaud.
A partir d’un programme succinct - un appartement très lumineux, un séjour traversant, une chambre d’amis, une salle de bain avec un dressing et une salle de sport pour le yoga et la boxe - et de longs entretiens à parler de tout autre chose, Antoine Lefebvre a perçu les attentes implicites de son client pour concevoir un lieu à son image. Intemporel et élégant, conçu au plus simple avec ce qui était sur place, l’appartement particulier touche à l’évidence, l’impression que rien n’a jamais été autrement.